Archives Jef Verheyen

De 1954 à 1984, Jef Verheyen est parvenu à inscrire son propre nom dans l’histoire de l’art abstrait flamand, belge et international. Il est notoire que le jeune Verheyen était certes le cofondateur du groupe avant-gardiste G 58, mais il s’est ensuite retiré de ce groupe d’artistes expérimentaux en 1960 pour fonder sa propre « Nouvelle école flamande ». Ce fait témoigne non seulement du sens critique affuté de Verheyen, mais également de ce que Freddy De Vree a décrit en 2004 comme suit : « Il s’est rapidement comporté comme un profane de l’art de la scène de son époque, alors qu’il voulait en réalité être le centre de cette même scène. »

Une analyse de son archive devrait clarifier les raisons qui ont été à l’origine du comportement de Verheyen en général et de son départ du G 58 (qui n’est pas passé inaperçu) en particulier. Peut-être que Verheyen s’intéressait moins à l’expérimentation en elle-même (en d’autres termes : pour l’expérience de l’art pour l’art) et souhaitait plutôt se plonger plus en profondeur dans les possibilités de l’art abstrait. De toute manière, les mots « extase » et « essentialisme » sont devenus à partir de 1959 les notions clés de sa propre réflexion critique et il voulait les utiliser pour partir à la recherche de l’universel. Le peintre s’est posé plusieurs fois des questions dont la plupart de ses contemporains du G 58 ne se préoccupaient pas vraiment. Verheyen n’était pas seulement un homme d’images, mais également un homme d’idées. (Réf. « The last Modernists — Jef Verheyen, Paul De Vree and the “Flemish landscape” of the 1960s » in: Jef Verheyen, Le Peintre Flamant, tent. cat., Langen Foundation (11.09.2010 — 16.01.2011), Bruxelles: ASA Publishers, 2010: p. 113.)

La mise à disposition de l’archive est primordiale pour se faire une idée précise de l’origine du flux d’idées constant de Verheyen. Sans aucun doute, ses amitiés avec des écrivains tels qu’Ivo Michiels et Paul De Vree, mais également avec son réseau de galeristes (Hans Liechti, Iris Clert, Axel Vervoordt, Galleria Pater, Hubertus Schoeller…) qu’il a entretenu lui-même l’ont aidé à se développer dans ce domaine. « Est-ce l’universalité tire son origine de la tradition ? », s’est par exemple demandé Verheyen dans un texte qu’il a publié. Le manifeste avec lequel il a lancé sa Nouvelle école flamande en 1959 témoigne d’un « intellectualisme » aussi cultivé. Une certaine rhétorique du Mouvement flamand se dégage dans le manifeste et témoigne peut-être de l’influence que des écrivains tels qu’Ivo Michiels et Paul De Vree ont exercée sur lui.

Plus qu’un peintre solitaire, Verheyen était un moderniste indépendant, un homo universalis tardif et un internationaliste dont l’intérêt en tant qu’élément de liaison entre le monde de l’art belge et international est difficile à surestimer. Ce dernier point est exprimé à la perfection avec Liber Amicis, qui est conservé dans l’archive et qui n’a jamais été publié à ce jour. Jef Verheyen y donne la parole à son réseau d’amis nationaux et internationaux.

Le CKV travaille depuis 2019 en collaboration avec l’Archive Jef Verheyen en vue de préparer la mise à disposition de l’œuvre et des archives de l’artiste Jef Verheyen (1932-1984). Pour y parvenir, le CKV met la plateforme Web « Ensembles » à disposition dans le cadre du développement de l’aperçu de l’œuvre et de la contextualisation de pièces d’archives importantes.